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MATT ELLIOTT

folk / Nancy

Biography

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Il y a les disques empathiques, les amis et puis il y a les autres… Peu de choses les séparent, un « je ne sais quoi », un « pas grand-chose », un « presque rien » qui en font ou des objets dérisoires ou des œuvres vitales. La musique de Matt Elliott malgré ou plutôt grâce à son désespoir sans cynisme ne nous tend jamais un miroir moraliste, elle installe au contraire un dialogue compassionnel avec son auditeur comme le rythme de deux pas qui se synchronise pour ne plus faire qu’un.

En 2016, Matt Elliott signait son septième album solo de ce titre sibyllin, ‘The Calm Before’, ni vraiment menaçant, ni vraiment apaisé … le calme avant quoi ? Avant la tempête assurément mais peut-être aussi avant l’immense disque, l’immédiatement classique que l’on sentait poindre depuis longtemps dans la discographie bicéphale du bristolien aussi bien sous son seul nom que sous son alias électronique Third Eye Foundation. ‘Little Lost Soul’ (2000), déjà, dans son élégance des détails et des perspectives, laissait présager le chef d’œuvre en germe chez l’anglais.

‘The Mess We Made’ (2003), le premier disque solo de Matt Elliott terminait d’installer un univers fuyant vers des horizons balkaniques au désespoir viscéral. Avec la trilogie Songs, il mettait à distance la dimension électronique dans son travail pour continuer de travailler une écriture blanche, sèche et lucide. ‘The Broken Man’ (2012), toutes en déchirures et en longues complaintes parfois portées par le piano de Katia Labèque, décline de nouvelles nuances de gris. Ce disque est aussi une rencontre, le début d’une collaboration avec le producteur, arrangeur et multi-instrumentiste David Chalmin (‘La Terre Invisible’) qui ne quittera plus le bristolien, prolongeant cet échange sur ‘Only Myocardial Infection Can Break Your Heart’ (2013) et ‘The Calm Before’ (2016).

C’est peut-être Stéphane Grégoire, le patron du label Ici D’Ailleurs qui accompagne Matt Elliott depuis 2005 qui en parle le mieux « Ce nouveau disque de Matt est sans aucun doute son meilleur album à ce jour, un disque qui le fait entrer dans une autre dimension et où Il s’affirme pleinement en songwriter et chanteur dans cette catégorie d’artistes comme Bill Callahan, Leonard Cohen ou Johnny Cash.»

Les autres disques de Matt Elliott étaient tous comme des liens empathiques tendus vers l’autre, ‘Farewell To All We Know’ est un classique immédiat appuyé par le piano sensible et les arrangements superbes de David Chalmin, le violoncelle sensible de Gaspar Claus, la basse subtile de Jeff Hallam (croisé aux côtés de Dominique A ou John Parish).  Tout relève ici d’une alchimie évidente, pourtant on retrouve les climats et les décors habituels de Matt Elliott, ce même folk des pays de l’Est, ces longues chansons qui prennent le temps de s’installer dans la durée. Tout est pareil et en même temps, tout est transfiguré. En asséchant sa musique, en épurant et en ramassant le propos, Matt  Elliott n’en est que plus délicat, ni vraiment chétif ni vraiment recroquevillé sur lui-même, il devient un air vital qui vibre et qui se déploie.

‘Farewell To All We Know’ en ouverture se déchire entre la peur du lendemain, l’inéluctable et l’espoir d’un avenir dans une tension dramatique permanente et progressive, sa guitare hispanique, le piano impressionniste et la voix de Matt au bord du murmure. Une élégie funèbre aux crépuscules qui n’en finissent pas de mourir et aux aubes que l’on aimerait voir poindre.

Dans ‘Farewell To All We Know’, Matt Elliott ne cesse de faire des allers-retours entre des envies de se confronter au monde ou de s’en protéger. ‘Hating The Player, Hating The Game’ pose un constat lucide sur nos quotidiens un peu mornes, ce droit à s’extraire du jeu, à ne plus vouloir en être. Matt Elliott est tendre mais en même temps, il n’épargne personne et en particulier lui-même, ‘Aboulia’ parle de la fatigue de vivre, de la mort qui s’annonce quand ‘Crisis Apparition’ dit qu’après le chaos, il y a toujours un temps pour la reconstruction. C’est une déambulation  qui peut tout d’abord paraître éprouvante dans les ruines d’Alep avec la lente dilution de la mélodie en un drone halluciné. Pourtant l’odeur des grands incendies finit toujours par s’estomper et la terre se régénère toujours, l’instinct de vie est plus fort que le froid du vent semble suggérer le britannique.

Matt Elliott ne chante jamais des certitudes, il leur préfère les peut-être. Peut-être, le pire est-il passé ? Peut-être… La tempête est peut-être passée et a tout dévasté, il ne reste plus qu’à reconstruire et à vivre. ‘Farewell To All We Know’  nous montre le chemin qui reste encore à faire, il marche à côté de vous, tout à côté, il est l’ami qui ne vous épargne pas, ce que sont toujours les vrais amis.

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