Poutrage Records porte bien son nom : enchevêtrement tout à la fois massif et complexe, camouflé par ce qu’il supporte. C’est du bois, c’est solide et c’est aussi propice à l’embrasement. Quel meilleur résumé pour un catalogue éclectique où la noise s’emboîte dans le jazz, où le metal surplombe le garage et tutti-quanti, chaque occurrence prenant un angle différent de la précédente mais s’intégrant parfaitement dans l’édifice final qui arbore des airs de cathédrale. Depuis 2011 et le séminal « Poutre En Ré Mineur » de PJL – une première sortie pyscho-plombée qui ne laissait en rien présager de la suite – la charpente s’est élevée lentement mais sûrement, poutre après poutre jusqu’à devenir incontournable dans le paysage DIY français, aux côtés d’autres irréductibles tels Vox Project, BeCoq, Arbouse Recordings, A Tant Rêver Du Roi et autres compagnons de bruit avec lesquels elle forme un bâtiment bouillonnant, foisonnant et passionnant qui rapproche harmonieusement les territoires. C’est qu’il ne se passe jamais bien longtemps sans qu’on aille fureter du côté de ce label littéralement inclassable : des heures (des mois et des années) passées dans les vapeurs de térébenthine, à friser la tendinite à force de poncer le bois au harpon, à bouffer des tonnes de ferraille, à rôtir sa peau de biche ou de vieille carne sous un soleil de plomb voire sous la pluie mais jamais sans anorak en en redemandant tout de même malgré les rhumes carabinés parce qu’à chaque fois, on reste bouche bée devant ce que l’on entend. C’est bien là le point commun à tout ce qu’il sort. Pas un disque en-dessous des autres, rien de faiblard mais rien de rutilant non plus. Ici, on reste imperméable aux modes et au temps qui passe, on maîtrise ses gestes, on manie comme personne les matériaux, on n’a jamais peur d’explorer la complexité ni de s’ouvrir au quatre vents et au final, on construit un catalogue varié et irréprochable que l’on peut prendre sans risque par n’importe quelle entrée. Artisanal, déterminé et très sûr dans ses choix, Poutrage Records a tôt fait de coloniser les étagères et une fois qu’on y a jeté une oreille, on se rend très vite compte que ses disques resteront toujours à proximité. De la belle ouvrage, un Art maîtrisé. ” Leoluce dcalc.